Paco de Lucia nous a quittés le 25 février 2014, décédant au Mexique d’une crise cardiaque, à l’âge de 66 ans.

Chacun pourra apprécier le parcours exceptionnel de ce guitariste de génie, qui a révolutionné le jeu de la guitare flamenca tout en permettant sa diffusion au-delà de ses frontières traditionnelles, qu’elles soient géographiques ou esthétiques.

Le guitariste espagnol, non seulement doté d’une sensibilité exceptionnelle et d’une technique instrumentale hors du commun, avait une vision philosophique aiguisée de l’engagement artistique. Il considérait que les risques pris sur ce plan étaient féconds. C’est ce qui l’a amené à interpréter des répertoires jusque là inconnus dans l’univers de la guitare flamenca, bouleversant les traditions qui la circonscrivaient généralement à un rôle d’accompagnement du chant et de la danse.

Ses disques consacrés à Manuel de Falla (1978) ou au concerto d’Aranjuez de Rodrigo (1991) témoignent de son ambition d’aborder la musique classique au travers de sa vision de guitariste flamenco. Paco de Lucia apprenait et s’appropriait ces répertoires de manière orale, ne sachant pas lire la musique. Ces interprétations ont apporté une écoute profondément nouvelle de ces chef-d’œuvres, notamment en mettant en valeur leur dimension rythmique intrinsèque, parfois laissée au second plan par les musiciens classiques.

Ses multiples collaborations artistiques avec des grands musiciens, principalement de jazz, témoignent également de son désir d’enrichir son propre vocabulaire musical en se confrontant à d’autres esthétiques, sans pour autant renier ses racines.

Paco de Lucia a ainsi fait école, permettant à de nombreux guitaristes flamencos de donner une dimension à la fois plus virtuose mais aussi plus musicale de la musique traditionnelle andalouse.

Au-delà de la tristesse que nous inspire cette disparition, le message artistique de Paco de Lucia doit nous rester bien vivant. Cet absence de sectarisme, ce souhait de dépasser ses propres limitations, cette vision d’une musique traditionnelle vivante et tournée vers le futur sont et resteront pour tout musicien de précieuses sources d’inspiration.