A quelle vitesse faut-il travailler son morceau ?

escargot

Photo Bertrand Kulik

Nous l’avons entrevu, la bonne gestion du temps est essentielle pour optimiser l’apprentissage. Cette gestion du temps s’exprime aussi dans la vitesse d’exécution d’une pièce que l’on est en train d’apprendre.

Combien de fois a-t-on entendu le professeur répéter comme une antienne : « joue moins vite ! »…

Ce conseil est souvent pertinent, mais ne doit pas être systématique. En effet, il est des situations où un jeu trop lent va venir parasiter l’apprentissage.

Des situations, et donc des objectifs différenciés

Pour définir à quelle vitesse un texte musical doit être répété, il faut distinguer les situation diverses dans lesquelles se pose la question. Il ne faut pas oublier que la situation d’apprentissage, loin d’être une simple répétition mécanique ritualisée, doit faire l’objet d’un objectif précis et différencié.

Pratiques collectives

Dans le cas de la musique d’ensemble, jouer lentement correspond souvent à un premier impératif de mise en place. Les objectifs sont alors que chaque interprète se cale sur une pulsation confortable, acquière les réflexes collectifs, soit attentif aux directives du chef… bref, se synchronise avec le groupe. Le travail lent, facilitant le jeu, peut être pertinent.

Le cas du débutant

Lorsqu’un élève débutant aborde une pièce nouvelle, l’objectif premier est de s’assurer qu’il possède une audition intérieure précise du rendu souhaité.

Or le débutant, qui doit déjà gérer un déchiffrage ardu, possède souvent une technique qui ne lui permet pas de jouer rapidement. Il jouera donc très laborieusement sa pièce et s’appropriera une audition intérieure qui sera le reflet de son jeu : très lente ! Cette audition intérieure lente, induite par des aptitudes en construction, sera un frein à sa progression. L’élève risque de « tourner en rond » : comment peut-il viser à jouer une pièce à un tempo qu’il ne peut même pas entrevoir ?

L’objectif est donc de jouer plus prestement le morceau, et pour cela il sera indispensable d’accélérer le débit de l’audition intérieure. À ce niveau, plusieurs approches seront possibles : apprentissage de la pièce oralement pour débrayer l’étape du déchiffrage, écoute de la pièce à la vitesse réelle, jouée par le professeur, ou encore apprentissage provisoire d’une version simplifiée pour réduire la difficulté technique.

L’élève avancé

Toute autre est la situation de l’élève relativement avancé, qui commence à maîtriser son texte mais bute encore sur des difficultés techniques. Il sait parfaitement ce qu’il doit atteindre mais n’y arrive pas encore.

Le jeu lent peut lui permettre de jouer et d’enchaîner parfaitement la pièce. Le travail s’effectue alors en mode 2. Il est utile, indispensable parfois, pour travailler un démanché délicat ou la bonne réalisation d’un agrément. Cependant, le risque de ce jeu ralenti sur une trop longue portion de pièce est de perdre au bout d’un moment la concentration de l’élève, et de réduire l’exercice à une répétition purement mécanique et non contrôlée. Le jeu lent sur de courts extraits serait alors préférable.lièvre et tortue

Mais lorsque le musicien commence à bien maîtriser l’exécution de sa pièce, la transition vers le mode 3 pourra se faire par le biais d’exécutions rapides, sur la pièce entière ou de courtes séquences.

l’expert

Pour le musicien très avancé que l’on peut qualifier d’expert, en situation de préparer un récital par exemple, le jeu lent sera l’occasion pour lui de tester sa concentration (son audition intérieure anticipant son geste technique), de travailler le feed-back, mais aussi de le mettre en confiance dans une phase d’échauffement notamment, en se concentrant sur les sensations ou la sonorité.

À ce niveau de jeu, un jeu accéléré pourrait également être efficace pour optimiser la fiabilité du feed-back, accroître l’endurance du musicien et en quelque sorte lui « donner le la marge ».

En résumé

Ainsi en résumé, la problématique de la vitesse d’exécution, relativement complexe, se pose en termes différents selon l’objectif à atteindre. Le professeur compétent sera à même de déterminer pour l’élève quelle est la bonne méthodologie à appliquer à un moment donné.

Cela peut expliquer qu’il donne sur la même pièce des consignes différentes, voire apparemment contradictoires !

escargot avec casque

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2 réflexions sur “A quelle vitesse faut-il travailler son morceau ?

  1. Je suis d’accord avec l’idée que dans l’apprentissage d’une nouvelle pièce, différentes vitesses d’exécution appliquées à différents passages soit une bonne chose. Je l’ai fait depuis longtemps avec succès je crois. Je note, qu’après l’utilisation de cette technique lors d’une pratique répétitive, que l’exécution à froid et à tempo de cette même pièce après 24 ou 48 heures est sufisament améliorée pour stimuler l’intérêt a continuer. Merci.

  2. Pingback: Mémoriser efficacement une partition : quatre étapes incontournables | Guitare et pédagogie, le blog de Mathieu de Person

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